JOURNAL DU CNRS N°251, DÉCEMBRE 2010

Depuis février 2010, le paléontologue Yves Coppens préside le nouveau conseil scientifique de la grotte de Lascaux. Nous l’avons rencontré peu de temps avant la réunion de ce conseil, qui doit se tenir au Collège de France du 6 au 8 décembre.

Pourquoi le ministère de la culture et de la communication a-t-il décidé, en février dernier, la création d’un conseil scientifique en lieu et place de l’ancien comité?

Cette idée a commencé à émerger en 2008 lorsque la menace d’inscrire Lascaux au patrimoine en péril de l’Unesco s’est faite plus sérieuse. À l’annonce de la création du conseil scientifique de Lascaux par Frédéric Mitterrand, en janvier 2010, j’ai été appelé pour piloter ce groupe de travail. En tant que président du conseil, j’en ai choisi les quatorze membres, en veillant à ce que les disciplines scientifiques impliquées dans la conservation de la grotte soient représentées. Le précédent comité scientifique, dont le mandat est arrivé à échéance en juillet 2009, dépendait directement du ministère de la Culture, son ancien président étant un inspecteur général de l’archéologie de ce même ministère. On a ainsi souvent reproché à ce comité d’être à la fois juge et partie, ce qui ne peut être le cas de l’actuel conseil scientifique dont les représentants ne participent, par ailleurs, à aucun des programmes de recherche menés sur le site de Lascaux. Une situation qui permet de se pencher sur l’état de santé de la grotte dans un souci d’indépendance et de libre arbitrage des débats autour de sa conservation (…)

Vous avez visité la grotte de Lascaux au mois de septembre en compagnie de Nicolas Sarkozy. Dans quel état se trouve-t-elle ?

Pour le moment, elle semble stable. Le jour de notre visite, le gardien m’a d’ailleurs confié que « la grotte allait bien ». Sa remarquable conservation doit sans doute beaucoup au savoir-faire des artistes qui ont réalisé les fresques. Les hommes de CroMagnon ont utilisé des pigments et des liants d’une qualité telle que les crises successives qui ont affecté la grotte semblent n’avoir eu aucun impact sur les peintures. Quant aux taches noires provoquées par le développement de champignons mélanisés – la dernière contamination en date –, elles semblent en régression. Mais on ne crie pas victoire pour autant (…)

À l’avenir, pensez-vous que la grotte pourra être fréquentée par d’autres personnes que les scientifiques ?

Ce n’est pas impossible et, à titre personnel, je n’y suis pas hostile. Les scientifiques qui en sont un peu les médecins doivent continuer à y descendre, mais l’information du plus grand nombre sur son état de santé passe à mon sens par une plus grande accessibilité aux passeurs de savoirs que sont les journalistes. Ces derniers pourront ainsi témoigner de l’évolution de la grotte au fil du temps. Toutefois, cette décision ne relève pas du conseil scientifique, qui n’a qu’une vocation consultative, mais du ministère de la Culture et de la Communication, qui la prendra au regard des conclusions que nous lui remettrons.

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